Souvenirs de Françoise Marquet-Zao
Recueillis par Yann Hendgen
* Texte écrit pour le catalogue de l’exposition « Le plus jeune parmi nous tous : Zao Wou-Ki à propos de Joan Miró » (20 mai -23 juillet 2021, Mayoral, Paris).
Françoise Marquet Zao, présidente de la Fondation Zao Wou-Ki, a accompagné Zao Wou-Ki dans sa vie et son œuvre. Elle s’attache aujourd’hui à promouvoir son travail, et entend ainsi rendre hommage, préserver et faire connaître son œuvre, afin d’en assurer la transmission. La Fondation Zao Wou-Ki a lancé en 2015 la préparation du premier tome du Catalogue raisonné des peintures (1935-1958), publié en novembre 2019. Les deux autres tomes (1959-1979 et 1980-2008) paraîtront en 2021-2022.
Madame Marquet, elle-même commissaire, a rencontré les acteurs majeurs de cette génération de l’École de Paris. La galerie Mayoral est reconnaissante d’avoir pu recueillir ses souvenirs de la rencontre de Zao Wou-Ki et Joan Miró et l’histoire de leurs liens privilégiés.
La rencontre de Zao Wou-Ki et de Joan Miró a lieu dès 1952 à la Galerie Pierre à Paris. C’est grâce à Henri Michaux que Zao Wou-Ki reçoit Pierre Loeb dans son atelier parisien de la rue du Moulin-Vert en janvier 1951. Il fait ainsi partie du groupe d’artistes défendus par Pierre Loeb après-guerre : Maria-Helena Vieira da Silva, Jean-Paul Riopelle, Arpad Szenes, Georges Mathieu. Joan Miró avait lui aussi exposé à la Galerie Pierre dès 1925 et pratiquement chaque année jusqu’en 1938.
Zao Wou-Ki racontait que Joan Miró venait à tous ses vernissages. Zao Wou-Ki était très touché de cette marque d’amitié et lui en a toujours été très reconnaissant.
Bien qu’ayant 27 ans de différence, ils fréquentaient les mêmes ateliers de gravure, comme celui de Madeleine Lacourière à Paris et les ateliers Polígrafa à Barcelone. Joan Miró et Zao Wou-Ki entretinrent une vraie relation d’amitié avec Manuel de Muga, propriétaire des éditions Polígrafa et de la galerie Joan Prats à Barcelone.
Ils avaient également de nombreux amis communs, comme Eduardo Chillida et Antoni Tàpies ; le directeur de musée Jean Leymarie, très lié à Joan Miró et qui écrivit la première monographie importante sur l’œuvre de Zao Wou-Ki en 1978 ; l’historien d’art Kosme de Barañano. Pierre Matisse, qui fut l’ami et le marchand de Joan Miró dès les années 1930, fréquenta Zao Wou-Ki dès le milieu des années 1960 et devint également son marchand aux Etats-Unis à partir de 1980.
Josep Lluís Sert faisait aussi partie de ce cercle. Il avait déjà construit l’atelier de Miró à Palma de Majorque en 1956. Un jour de 1970, il téléphone à Zao Wou-Ki pour l’informer qu’il a acheté une colline à Ibiza et qu’il veut y construire six maisons avec ateliers, qu’il réserve à des artistes. Il lui propose d’en acheter une, ce que Zao Wou-Ki accepte immédiatement, sans même l’avoir vue. Zao Wou-Ki prend possession de sa maison en 1972 et fait construire quelques années plus tard l’atelier, toujours sur les plans de Sert. A partir de 1973, il y vint régulièrement l’hiver et l’été avec son épouse Françoise. Elle rapporte qu’à chacun de leurs séjours, ils dînaient chez José Luis Sert, dans sa maison à proximité de la sienne. En 1988, Zao Wou-Ki peignit, à la demande de Françoise, le tableau Hommage à José Luis Sert – 14.07.88, pour le salon principal de leur maison d’Ibiza, face à la mer.
En 1977, pour le mariage de Zao Wou-Ki et Françoise, Joan Miró leur envoya une lettre de félicitation, illustrée de dessins recto-verso, signée par Joan et de sa femme Pilar.
En 1994, Zao Wou-Ki donna à la Fundació Joan Miró de Barcelone un tableau de 1962. Dans la lettre à la directrice de la Fundació Mme Rosa Maria Malet qui accompagne cet envoi, il indique donner ce tableau « en souvenir de la longue amitié avec Joan Miró ».